Notre équipe a trouvé un encart sur internet dont le propos est «l’automobile».
Son titre séduisant (La trouble fin du gnral Mohamed Oufkir) est sans détour.
Annoncé sous le nom «d’anonymat
», l’éditorialiste est connu et fiable.
Vous pouvez de ce fait donner du crédit à cette information.
La date d’édition est 2022-08-16 04:17:00.
Voilà ll’article en question :
« Jeune officier plein d’allant et d’énergie, conservant dans toutes les situations le calme le plus parfait. (…) Représente le type parfait de l’officier marocain baroudeur, jusqu’à la témérité. » (Citation à l’ordre du corps d’armée du 6 juillet 1944). « Commandant d’unité qui ne cesse de se surpasser au cours de divers engagements avec les rebelles. » (Citation à l’ordre de l’armée du 7 novembre 1949).
Il y a cinquante ans, le 16 août 1972, le corps du général Mohamed Oufkir, 52 ans (il est né le 14 mai 1920), a été retrouvé dans l’enceinte du Palais royal de Skhirat, au bord de l’océan, entre Rabat et Casablanca, au Maroc. Officiellement, il se serait suicidé mais cela aurait été un « suicide à la Robert Boulin », avec trois balles dans le dos et une balle dans la nuque.
À la suite de ce qui pourrait raisonnablement s’appeler un assassinat (ou une « exécution », si l’on considère que l’État a son droit de vie et de mort), sa famille a passé à partir du 23 décembre 1972 une vingtaine d’années dans les prisons du roi du Maroc, Hassan II, en particulier sa veuve Fatéma, sa fille Malika et son fils Raouf (il a eu six enfants), chacun a eu l’occasion d’écrire des livres témoignages sur le sujet.
Il est vrai qu’il devait y avoir peu de monde à regretter la mort du général Mohamed Oufkir car pour beaucoup, il était synonyme d’assassin et de tortionnaire, malgré une bonne réputation au début de sa carrière militaire. Originaire, au Maroc, d’une région frontalière à l’Algérie (berbère), il s’est en effet engagé à 21 ans dans l’armée française pour combattre les nazis et a participé à la campagne d’Italie sous le commandement du général Alphonse Juin. Son père avait été nommé pacha (gouverneur) vers 1912 par le maréchal Hubert Lyautey, premier résident général au Maroc.
Après la guerre, Mohamed Oufkir a continué dans l’armée française en Indochine entre 1947 et 1949, en terminant au grade de capitaine, ce qui lui a valu, au total, d’être nommé officier de la Légion d’honneur à titre militaire, la croix de guerre, etc. et d’avoir huit citations.
En 1950, il a quitté l’engagement opérationnel en devenant spécialiste du renseignement comme aide de camp du général Raymond Duval, commandant supérieur des troupes en Tunisie et au Maroc. Membre du cabinet militaire du résident général Pierre Boyer de Latour en 1955 (Alphonse Juin avait été aussi résident général au Maroc de mai 1947 à juillet 1951), Mohamed Oufkir a participé aux négociations pour le départ du sultan Sidi Mohammed Ben Arafa et le retour du sultan Mohammed Ben Youssef.
En 1955, Mohamed Oufkir, encore officier français, fut affecté auprès du sultan à la demande de ce dernier peu avant l’indépendance du Maroc. Considéré comme une personnalité politique du Maroc indépendant, il a alors commencé une brillante carrière dans la sécurité et le renseignement au Maroc, prenant une influence de plus en plus déterminante.
Après son retour triomphal le 16 novembre 1955, le sultan Mohammed Ben Youssef est devenu roi du Maroc le 14 août 1957 sous le nom de Mohammed V. Entre-temps, le Maroc était devenu complètement indépendant le 2 mars 1956 (accord avec la France) et le 7 avril 1956 (accord avec l’Espagne). Devenu lieutenant-colonel, Mohamed Oufkir avait un objectif clair : créer les Forces armées royales et réduire l’influence de l’Armée de libération nationale marocaine et de l’Istiqlal. Il a pris part à la répression contre le soulèvement du Rif entre novembre 1958 et janvier 1959. Il fut alors nommé directeur de la Sûreté en mai 1960.
En février 1961, Hassan II a succédé à son père Mohammed V après la mort de ce dernier au cours d’une opération chirurgicale. Proche conseiller de Hassan II, le colonel (nommé en 1962) Oufkir a supervisé la répression contre l’Union nationale des forces populaires (UNFP), un parti d’opposition situé à gauche, en arrêtant une centaine de cadres lors d’une réunion de son comité central le 16 juillet 1963. Un de ses responsables, Mehdi Ben Barka, était absent, au Caire. Mohamed Oufkir a alors acquis une réputation de tortionnaire sur les personnes qui avaient été arrêtées.
Finalement, sous la pression internationale, le 14 mars 1964, le tribunal criminel de Rabat a condamné à mort seulement 11 personnes, dont 8 par contumace, dont Mehdi Ben Barka. Les 3 condamnations à mort furent commuées le 11 août 1964 en détention perpétuelle avant d’être annulées après la révolte étudiante réprimée dans le sang le 23 mars 1965. On a raconté que le nouveau général Oufkir, devenu Ministre de l’Intérieur en 1964, tirait à la mitraillette sur les contestataires depuis un hélicoptère.
Quelques mois plus tard, le 29 octobre 1965, Mehdi Ben Barka qui, au-delà de son rôle d’opposant politique au Maroc, était l’un des principaux leaders du mouvement tiers-mondiste, a été enlevé en plein centre de Paris alors qu’il se rendait à la brasserie Lipp (boulevard Saint-Germain) pour un rendez-vous. Il a été emmené de force dans une Peugeot 403 banalisée. Medhi Ben Barka n’est jamais réapparu. L’alerte fut rapidement donnée dès le lendemain, par Jean Lacouture, Gisèle Halimi, Edgar Faure qui a informé Roger Frey (le Ministre de l’Intérieur en France).
L’affaire de l’enlèvement de Mehdi Ben Barka a fait beaucoup couler d’encre en France, devenue un scandale politique qui a conduit à une forte tension dans les relations diplomatiques entre la France et le Maroc. En juillet 1967, la justice française a finalement condamné Mohamed Oufkir par contumace à la réclusion criminelle à perpétuité pour l’assassinat de Mehdi Ben Barka (le 29 octobre 1965, il aurait été présent à Paris et plusieurs prévenus ont cité son nom).
À partir de cette condamnation, Hassan II s’est éloigné de son ministre encombrant. Le général Oufkir a réussi néanmoins à retrouver la confiance du roi en déjouant un complot auquel il aurait lui-même participé. Effectivement, le 10 juillet 1971 a eu lieu un putsch militaire contre Hassan II et son régime, dans son palais à Skhirat, où le roi recevait pour ses 42 ans. Les combats furent rudes (une centaine de morts dont un ancien Premier Ministre marocain, un ministre marocain et huit Français), et Hassan II sauva sa vie en se cachant dans son dressing. Mohamed Oufkir, qui faisait partie des conspirateurs, retourna sa veste et sauva le roi en se retournant contre les putschistes. Parmi eux, dix officiers généraux furent condamnés à mort et exécutés. Oufkir fut nommé Ministre de la Défense et commandant en chef des Forces armées royales.
Le second putsch militaire contre Hassan II lui a été fatal. Mohamed Oufkir, aidé du commandant adjoint de l’aviation militaire Mohamed Amekrane et du commandant de la troisième base aérienne de Kénitra Louafi Kouera, a ordonné le 16 août 1972 à plusieurs pilotes de chasse marocains d’abattre le Boeing royal ramenant Hassan II de la France au Maroc. Après des séquences rocambolesques, Hassan II échappa à ses conspirateurs, Louafi Kouera, l’un des pilotes de chasse, qui fut arrêté (puis condamné à mort), accusa Mohamed Oufkir, retrouvé « suicidé », d’être au centre de ce complot et Mohamed Amekrane, qui a réussi à s’enfuir à Gibraltar, fut extradé par le Royaume-Uni, puis jugé, condamné et exécuté par la justice marocaine.
Après ces deux tentatives de putsch, Hassan II est devenu son propre Ministre de la Défense et commandant en chef de ses armées. Les 58 putschistes des deux putschs qui furent condamnés à la détention ont été transférés au bagne de Tazmamart avec des conditions de vie très difficiles. Seulement 28 en ont survécu lorsqu’ils furent libérés en 1991 après la fermeture du bagne sous la pression internationale.
Mohamed Oufkir restera dans l’histoire un homme de pouvoir qui, sans doute, ne pouvait se contenter d’être un homme d’influence. Cruel selon des témoignages, il a eu une fin qui restera aussi mystérieuse que celle de Ben Barka, probablement l’une de ses nombreuses victimes. Hassan II a eu ce lourd passif, ces « années de plomb », lorsqu’il a repris le déroulement normal des relations diplomatiques avec la France sous François Mitterrand, tandis que le journaliste français Gilles Perrault, auteur notamment de « Le Pull-over rouge » en 1978 (éd. Ramsay), a sorti son livre choc « Notre ami le roi » en 1990 (éd. Gallimard).
Aussi sur le blog.
Sylvain Rakotoarison (14 août 2022)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
Mohamed Oufkir.
Le Printemps marocain ?
Les millions de DSK et le Brexit…
Vous aimerez aussi:
À travers l’Inde en automobile/37,Ouvrage . A emprunter en bibliothèque.
L’Abitibi, pays de l’or/Chapitre 11,Clicker Ici .
Photographie/Les premiers pas/L’appareil photographique,(la couverture) .
Wikipédia/Contribuer à Wikipédia/Modifier une page,Clicker Ici .